Les cafés philo

Nous poursuivons, une fois par trimestre, nos rendez-vous de réflexion philosophique animés par Dominique Paquet, autour de certains de nos spectacles qui nous paraissent propices au débat d’idées.

De quoi la transgression est-elle la transgression ?
Chaque société s’inscrit dans un ensemble de lois, de règles, de valeurs, de normes et de tabous qui délimitent les frontières de sa culture et de sa vision du monde. Malgré tout, la transgression fait partie également de ce qu’une société peut ou non supporter de la part de ses membres.
Rébellions, rituels de libération, désobéissance civique, renversement des valeurs rythment la vie des sociétés.
Mais jusqu’où ? Quelles sont les limites qui ne peuvent être franchies ? Le XXe siècle et le début du XXIe ont vu apparaître d’autres transgressions : transgression dans l’art avec Marcel Duchamp, dans les mœurs avec, par exemple, les mises en scène violentes du corps, stratégies transgressives de vente…
Dans une société dont la transgression est l’un des maîtres mots, existe-t-elle encore ? N’est-elle qu’un jeu ou a t-elle une nécessité anthropologique ?
Existe-t-il des tabous indépassables ? De quoi la transgression est-elle in fine la transgression ?

En lien avec Julia de Christiane Jatahy présenté au lieu unique du 31 mars au 4 avril
— mardi 31 mars à 18h30
— entrée libre

Dominique Paquet est docteur en philosophie, comédienne et dramaturge. Elle a publié, notamment à L’École des Loisirs, dans la collection Théâtre, Maman Typhon (2014) et La Consolation de Sophie, théâtre philosophique pour jeune public (2011) et aux éditions Gallimard, La Beauté (2013, préface de Camille Laurens).

les rendez-vous passés

Un monstre est-il un être humain augmenté ou diminué ?
Si la science peut permettre de répondre objectivement à cette question provocatrice et si l’opinion commune assimile la monstruosité physique ou morale à une diminution, que peut en dire la philosophie ?
La question du monstre traverse la mythologie et la littérature mais elle est aussi régulièrement visitée par l’éthique sur les bases de la psychologie. Lié au mal, car il n’existe pas de monstre bénéfique dans l’opinion commune, le monstre serait celui qui relève de l’inhumain ou du transhumain. Celui qui est tombé et a perdu les qualités essentielles de l’humain ou celui qui dépasse ces valeurs.
Mais l’humain est-il vraiment humain au sens où l’humanité, valeur morale de générosité, compassion et bienveillance, le caractériserait ? Et si le monstre peut habiter au cœur de l’homme, n’est-il pas finalement tout ou partie de cet humain ?
En utilisant les concepts d’homme augmenté ou d’homme diminué, on pose peut-être encore un jugement moral étayé sur la base de la croyance en l’humanité de l’homme. Celle-ci n’est-elle pas pourtant toujours à conquérir ? Quels sens ont dans ce cas l’augmentation ou la diminution de l’humanité en l’homme ?
Au carrefour de l’éthique, du religieux et des technologies, le concept de monstre vient troubler nos représentations.
Il sera intéressant de le questionner aussi à la lumière du surhomme nietzschéen et du transhumain de demain, homme augmenté par la technologie.

En lien avec Roses de Nathalie Béasse, d’après Richard III de W. Shakespeare présenté au lieu unique du 14 au 16 octobre
— mardi 14 octobre à 18h30
— entrée libre

Toute création est-elle autobiographique ?
Pour certains, l’œuvre, qu’elle soit écrite, plastique, architecturale, n’a rien à voir avec l’autobiographie du créateur. Elle doit être dans ce cas découverte pour elle-même et parfois sans que l’on sache qui en a été le concepteur. Pour d’autres, la création a tout à voir avec la biographie, elle en est la matière même, un travail de transmutation de la vie, au travers des mots, des matières, des formes. Pensons à Jean- Jacques Rousseau et ses Confessions, à Nietzsche dans Ecce Homo, à Sartre dans ses entretiens avec Simone de Beauvoir, à Camus, pour ne citer qu’eux.
La découverte de l’œuvre se double alors du plaisir de retrouver dans la biographie de son auteur les traces, les empreintes, les événements originels réinterprétés. La compréhension de l’œuvre s’enrichit de cette matière autobiographique que certains auteurs revendiquent. Pourtant, devant des œuvres très complexes, on se demande bien quels détours de la vie ou quelles contorsions de la pensée ont pu les faire naître.
Séparer l’œuvre de la biographie peut néanmoins être un moyen de pouvoir apprécier la richesse d’une création sans se laisser influencer par des auteurs dont la biographie comporte des trous noirs. Pensons aux auteurs collaborationnistes, antisémites voire fascistes que l’on peut avoir plaisir à lire mais dont la vie n’a pas été à hauteur d’homme. Faut-il avoir une position éthique ou littéraire par rapport à ces œuvres ? Peut-on lire Céline, Jouhandeau, Brasillach sans lier leurs œuvres à leurs biographies ? Peut-on lire Aragon sans penser qu’il fut complice d’un mensonge d’État ?
Enfin, n’est-ce pas réducteur de lier l’œuvre à l’autobiographie ? Où se situe la liberté de l’artiste et corollairement du lecteur ? Si l’œuvre n’est que la transposition d’une matrice existentielle obsédante, n’est-elle pas plutôt le symptôme d’une pathologie plutôt que d’une vision du monde ? Et dans ce cas, ne manque-t-elle pas ce qu’elle prétend atteindre ?

En lien avec 887 de Robert Lepage présenté au lieu unique du 24 au 28 février
— mardi 24 février à 18h30
— entrée libre

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