À l’Ouest
Olivia Grandville
BONUS
Découvrez Amos-Albuquerque un carnet de voyage composé par Olivia Grandville lors du voyage qui a inspiré le spectacle : tous les jours à partir de 18h, au Foyer Haut.
Le spectacle
Tiré d’un voyage à la rencontre du tambour de pow-wow et partant de la musique de Moondog, À l’Ouest prend le véhicule des danses amérindiennes dont la triple dimension, à la fois sociale, sacrée et militante, permet à Olivia Grandville d’interroger sa propre nécessité de danser, mais aussi le rapport à la spiritualité dans les sociétés désacralisées, et la position de l’artiste dans sa démarche d’appropriation culturelle. En miroir de cette tradition à la fois fantomatique et très vivace, elle poursuit sa réflexion sur la mémoire des danses et des corps.
À l’Ouest part de la figure du musicien Moondog, qui pourrait être une sorte de Artaud chorégraphique, une figure de télescopage, qui ouvre des sas.
Son surnom était “ the bridge ”, celui qui fait “ le pont ”. Le pont entre la musique baroque, le tambour du pow-wow, le jazz, par exemple. Le pont entre le savant et le populaire. J’aime ces figures d’artistes . la marge de la marge. Moondog est une sorte de cheval de Troie que j’emprunte pour aller chercher d’autres choses, comme le rapport païen au sacré. Enfant, il a assisté à une danse du soleil et vraisemblablement à plusieurs cérémonies pow-wow dans les communautés amérindiennes du Minnesota. Cette pulsation l’a marqué à jamais et a été la base de tout son travail.
Le voyage semble avoir été déterminant sur l’écriture du projet ? Avez-vous échangé des danses ?
Il n’est pas question pour les Amérindiens d’échanger leur danse. Quand bien même on est à une époque de sampling de tout, quand bien même un artiste est quelqu’un qui s’inspire et s’approprie d’autres choses que sa culture à lui, quand bien même il y aurait une racine commune à toutes les danses… Le voyage m’a renvoyée à ma suprématie blanche de manière assez violente. Mais ce que j’ai rencontré est à la fois loin de moi et proche. Dans une réserve où je me suis rendue, un porteur de drapeau m’a fait remarquer que la danse était mon “ métier ” tandis qu’elle était son mode de vie. Je lui répondu que si j’étais là, c’est justement parce que je ne souhaite pas que cela devienne trop mon “ métier ”, cela reste pour moi un mode de vie et un rapport au monde. Je ne veux pas perdre cela.
À quel endroit la rencontre des danses s’est-elle faite ?
Le pow-wow est une tradition spirituelle mais aussi une pratique militante. Dans ces danses, le temps fort est tout le temps en haut, il s’agit de soulever une énergie de la terre, de se soulever. C’est aussi mon désir de danseuse, continuer de se mettre en mouvement, soulever la gravité des choses. Je ne peux pas rencontrer cette danse mais je peux partager ce battement de coeur du tambour du pow-wow, me reconnaître dans cette forme à la fois très libre, et très codée : comme dans les battles de hip hop, chaque danseur interprète son style. Mais elle reste une danse étrangère, elle reste un mystère et je peux donc continuer de la fantasmer. Nous allons travailler sur cette idée.
Les Etats-Unis (et le Canada) sont une ancienne colonie elle-même devenue culturellement colonisatrice. Les autochtones sont dans une spirale d’invisibilité vertigineuse…
J’espère qu’ils sont en train d’en sortir mais c’est à eux de répondre. Cependant je suis aussi partie là-bas parce que je ne me voyais pas partir à Calais, faire un projet sur les migrants. Eux sont dans des réserves depuis des décennies sans que personne ne s’en préoccupe. Cela nous renvoie bien à notre position de colonisateurs, mais d’un peu plus loin que l’actualité immédiate qui fait notre quotidien. Brandir des grands sujets de société sur les plateaux me met mal à l’aise, je ne suis pas bien persuadée de la validité de cela hormis le fait de former une sorte de consensus avec un public déjà convaincu. Tout se passe à travers un carnet de voyage, mais c’est peut-être aussi une fiction, les époques s’y mêlent on y rencontre des Amérindiens, Moondog, une performeuse de 92 ans, mais j’ai peut-être tout inventé, je suis de toute façon une touriste en terre inconnue.
Interview réalisée par Isabelle Barbéris
- Distribution
Chorégraphie Olivia Grandville
Textes et entretiens Olivia Grandville
Remerciements pour leur coopération et leurs témoignages Carl Seguin, Réjean Boutet, Malik Kistabish, Marguerite Wylde, Israël Wylde-McDougall, Katia Rock et Marie Léger.
Musiques Moondog, Alexis Degrenier
Interprétation Lucie Collardeau, Clémence Galliard, Olivia Grandville, Tatiana Julien et Marie Orts
Percussion et vielle à roue Alexis Degrenier / Will Guthrie
Réalisation sonore Jonathan Seilman
Lumière Yves Godin
Régie son Lucas Pizzini
Dispositif scénique Olivia Grandville et Yves Godin
Costumes Eric Martin
Images Olivia Grandville
Regard extérieur Magali Caillet
Collaborations Stéphane Pauvret, Aurélien Desclozeaux, Anne Reymann
Remerciements Amaury Cornut - Autour du spectacle
Almos – Albuquerque : diffusion d’un film / carnet de voyage autour du spectacle, chaque soir en boucle à partir de 18h.
Rencontre avec Olivia Grandville, jeudi 17 mai, à l’issue de la représentation.
- Mentions
Production : La Spirale de Caroline
Coproductions : le lieu unique, scène nationale de Nantes ; La Place de la Danse – CDCN Toulouse / Occitanie; la Ménagerie de Verre (Paris) ; le Centre Chorégraphique National de Nantes ; de Charleroi Danse.
Avec le soutien de la Ville de Nantes, de l’Institut Français, de l’Ambassade de France à Ottawa (CA).
La Spirale de Caroline est conventionnée par le Ministère de la Culture – DRAC Pays de la Loire.Avec le soutien de la Ville de Nantes, de l’Institut Français, de l’Ambassade de France à Ottawa (CA).
La Spirale de Caroline est conventionnée par le Ministère de la Culture – DRAC Pays de la Loire.
Crédits photos :
© Stanislav Dobák